Le Saviez-Vous? #3 – 1900/1930
Origins III, 1900 – 1930
Cette rubrique est un espace d’inspiration, autour du vidéo mapping et de toutes ses influences ! Pour ce troisième article, HeavyM a sélectionné pour vous des inventions originales et des concepts de pionniers, à la recherche d’une communion entre la lumière et le son. Au début du 20e siècle (1900 – 1930), les progrès techniques commencent à investir le quotidien : les instruments de musique des couleurs sont plus performants, ils se jouent sur scène à l’occasion de spectacles et puisent leur esthétique dans l’art de l’époque : le futurisme, l’art abstrait et les premières manifestations de l’art cinétique.
1915 > Luce
Ecrit et construit par le compositeur russe Alexandre Scriabine
La seule performance de ce clavier à lumières a été le concert Prométhée ou le poème du feu au Canergie Hall New York. Jamais une partition n’avait été jouée comme Luce : les gammes produisent en temps réel des notes de musique et des projections colorées. Scriabine a construit un système d’analogie notes / couleurs très précis. C’est l’un des premiers spectacles à associer orchestre, piano, orgue et clavier à lumières : une symphonie de couleurs, pour transporter l’audience… Ailleurs !
Association touches – couleurs © Wikipedia
Partition Prométhée ou le poème du feu, Scriabine © Jean-Christophe Roelens, Lendroit éditions
Performance Prométhée ou le Poème du feu, 1997 © Olivier Lussac, artperformance.org
Performance Prométhée ou le Poème du feu, 1997 © Olivier Lussac, artperformance.org
1915 > Le Piano Audion
Inventé par l’ingénieur américain Lee de Forest
Cet inventeur s’est surnommé lui-même « le Père de la radio » et a déposé plus de 300 brevets ! Pour la première fois, un clavier simple, manuel, combine des lampes triode et des audions, sorte de tubes à vide qui seront les premiers composants de l’amplificateur électronique. Le progrès du piano audion : sa capacité à produire des sons complexes ressemblant à ceux du violon, du violoncelle et des instruments à bois. Il est l’un des pères du son optique, avec le phonofilm en 1919, procédé qui sera acheté par la Fox pour Warner Bros qui réalisera ainsi les premiers films chantants.
Les ampoules Audion, producteurs de sons musicaux purs, L’Expérimentateur Electrique, décembre 1915 © 120years.net
Lee de Forest © Encyclopædia Britannica, Inc.
1918 > Le Sarabet
Fabriqué par la pianiste américano-syrienne Mary Hallock-Greenewalt
Contrairement à beaucoup d’inventeurs, Mary n’a pas établi de correspondances strictes entre les sons et les couleurs car elle a intégré la possibilité d’une synchronisation aléatoire, variable en fonction de la personnalité et de la compétence du musicien. Elle a déposé 9 brevets pour créer cet automate, dont le rhéostat, premier modulateur de l’intensité du courant ! Elle appelle son art Nourathar, (Lumière Essence en arabe), The Fine Art of Light-Color Playing ( les Beaux-Arts de la lumière colorée).
Mary Hallock Greenewalt avec le Sarabet © Red Bull Music Academy Daily
1922 > L’Optophone
Imaginé par l’écrivain, photographe et plasticien viennois Raoul Hausmann
Ce dadaïste a dessiné une machine sensorielle constituée d’une cellule photo-électrique capable de transformer les sons en lumières colorées et inversement. Un brevet a été déposé mais l’instrument n’a jamais été achevé. En 2004, l’artiste Peter Keene, passionné par l’histoire des technologies et des sciences, a mené de nombreuses recherches pour reproduire l’optophone de Raoul Hausmann.
Raoul Haussmann revisité par Peter Keene, 2004 © Peter Keene
1924 > Le Piano optophonique
Présenté par le peintre futuriste russe Vladimir Baranoff-Rossiné
Cet instrument a été joué pour la première fois lors d’un « concert coloré opto-visuel » au théâtre Meyerhold de Moscou. L’extérieur ressemble à un piano classique, mais cache un mécanisme totalement nouveau : des disques transparents peints par l’artiste, des prismes, des lentilles, des miroirs diffusent des images mouvantes au rythme de la musique émise par le clavier.
Il cherche à « donner libre cours et d’une manière encore jamais vue à la dynamique de la lumière en couleur, chose à laquelle nous ne faisions que rêver. Voilà où se trouve la réalité. Un immense champ d’action pour la création picturale. En une seconde, des milliards de tableaux, un kaléidoscope universel de la volonté. La musique certainement est un compromis avec le public. Le vrai but – la fin en soi – est une peinture vivante dans le temps et non pas sourde-muette ». Lettre de Baranoff-Rossiné aux Delaunay du 19 décembre 1924.
Piano Optophonique, reconstitution par Jean Schifrine, 1971 © Philippe Migeat – Centre Pompidou, MNAM-CCI /Dist. RMN-GP
Disques en verre peints du Piano Optophonique © Indexgraphik.fr
1925 > Le Sonchromatoscope
Réalisé par le pianiste et compositeur hongrois Alexander Laszlo
Cet orgue de couleurs est doté d’une console de mixage, d’un projecteur de diapositives, de spots et de filtres de couleurs changeants pour intensifier ou diminuer la lumière. Les différentes diapositives permettent de projeter des couleurs en mouvement mais aussi de faire apparaître des formes ! Cette invention a permis à Laszlo de produire Color-Light-Music , un spectacle musicalo-visuel extravagant, en tournée dans toute l’Allemagne de 1925 à 1926. Il souhaitait partager avec les spectateurs les associations de couleurs qu’il percevait quand il jouait au piano.
Matthias Holl, Couleur – Lumière – Musique par Alexander Laszlo, 1925 © handmadecinema.com
Sonchromatoscope, Alexander Lazslo © Marco de Bias
1926 > Clavilux « La lumière jouée par un clavier »
Construit par le musicien danois Thomas Wilfred
Clavilux est une machine électrique composée de 4 casiers en métal qui abritent des systèmes rotatifs et des petites sculptures en fer et verre. Le clavier intégré permet de projeter et de réfléchir la lumière, filtrée, mouvante grâce au jeu des roues et des sculptures. Grâce à cette nouvelle machine, Wilfred a produit Lumia , des performances lumineuses abstraites que les spectateurs comparaient à des aurores boréales. Il est considéré comme le pionnier du light art et a influencé de nombreux artistes modernes et contemporains.
Les compostions Lumia de Thomas Wilfred’s Opus 140. © 2014 Clavilux.org
Thomas Wilfred en concert avec son Clavilux, 1922 © quidsitlumen.net
1928 > Le Spectrophone
Conçu par le sculpteur tchèque Zdeněk Pešánek
ntéressé par l’art cinétique, il demande au leader du piano Petrof de réaliser un clavier, et ajoute une sculpture de projection munie d’un système de contrôle des formes. Chaque touche du clavier peut allumer l’une des trois couleurs programmées (rouge, vert et bleu) pour créer une danse de ronds et de points colorés. En 1929, il construit la sculpture cinétique Edisonka pour la centrale électrique de Prague, considérée comme la version automatisée du spectrophone. Composée de 420 ampoules, la sculpture diffuse tous les soirs des spectacles cinétiques lumineux pré-programmés.
Les compostions Lumia de Thomas Wilfred’s Opus 140. © 2014 Clavilux.org
A suivre, Origines IV, 1930-1950’s
– Séverine pour HeavyM Team